Ayant quitté son Jura bernois natal, André Bösiger avait adhéré en 1929 à l’âge de 16 ans à la Ligue d’Action du Bâtiment (LAB), tendance anarcho-syndicalsite de la Fédération ouvrière du bois et du bâtiment (FOBB), qui sur les chantiers pratiquait l’action directe empêchant les heures supplémentaires ou le travail du samedi. La LAB luttait également contre les expulsions et les saisies dont étaient victimes les chômeurs ne pouvant plus acquitter leurs loyers. Il rejoignait également le groupe anarchiste genevois qui, selon son témoignage, réunissait chaque semaine entre 20 et 50 personnes, dont beaucoup d’ouvriers italiens ayant fui le fascisme et se liait d’amitié avec en particulier Luigi Bertoni et Lucien Tronchet. Le 9 novembre 1932 il participait à la manifestation antifasciste au cours de laquelle l’armée, protégeant une réunion fasciste, ouvrit le feu tuant 13 manifestants dont un ami d’André tué à coté de lui d’une balle en pleine tête.
Appelé peu après sous les drapeaux, André se déclarait insoumis et était condamné à 17 mois de prison. Pour protester contre cette condamnation, les compagnons L. Tronchet et A. Moret déposaient dans la nuit du 19 décembre 1935 un pétard au monument aux morts de la grippe de Genève ce qui leur valut d’être condamnés respectivement à 2 ans et 15 mois de prison. C’est au cours de cette détention à la prison Saint-Antoine que Boseiger apprit à lire et à écrire et qu’il fit la lecture de A- Z du Petit Larousse ; il ajoutait malicieusement « Est-ce que ça fait long deux ans de prison ? En faut j’aurais eu besoin de deux années de plus pour finir tout ce que j’avais à lire ». A sa sortie du pénitencier en 1937, il fut dissuadé de partir comme volontaire en Espagne par L. Bertoni qui considérait qu’il était plus utile en Suisse. André Bösiger se consacra alors à faire transiter des armes –dissimulées dans des camions de ravitaillement et de vêtements — de Suisse en France pour les compagnons espagnols. Il s’occupa également de la prise en charge d’enfants espagnols orphelins de guerre.
Pendant la seconde guerre mondiale, réduit au chômage pour ses activités syndicales, il survit en pratiquant le braconnage et assura également de nombreux passages de frontière (hommes et armes) pour le compte de la résistance française. A la libération il fut extrêmement déçu par l’attitude de son ami, Lucien Tronchet, qui entraîna avec lui de nombreux autres militants syndicalistes et anarchistes au Parti Socialiste.
Pendant la guerre d’Algérie il continua ses activités de passeur au profit des insoumis, des déserteurs et des militants algériens du FLN qu’il hébergea souvent et pour lesquels il trouvait papiers et travail. Il déclarait souvent « J’ai lutté pour la libération de la France de l’occupation nazie, il était normal que j’aide les Algériens à se libérer de l’occupation française ». Lors de l’indépendance de l’Algérie il participa à la création de coopératives et aux tentatives autogestionnaires qui furent ensuite détruites lors de la prise de pouvoir par Boumedienne.
En 1957 André Bösiger fut l’un des fondateurs du Centre International de Recherches sur l’Anarchisme (CIRA) et participa à la construction du local puis à ses activités. Il fut à la même époque le gérant d’une nouvelle série du journal bilingue Le Réveil anarchiste (Genève, janvier 1957-décembre 1960). En 1990 il perdait sa compagne Ruth dite Coucou et fut ensuite le gérant de L’Affanchi organe de la section suisse de l’AIT. André Bösiger qui était également militant de la Libre Pensée est décédé le 13 avril 2005 à Genève.
Œuvre : — Souvenirs d’un rebelle (Ed. Canevas, 1992).