Dictionnaire international des militants anarchistes
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Y’en a pas un sur cent… et pourtant des milliers d’hommes et de femmes de par le monde, souvent persécutés, embastillés, goulagisés et parfois au prix de leurs vies, ont poursuivi leur chevauchée anonyme à la recherche d’un impossible rêve : un monde sans dieux ni maîtres.

BARRUCAND, Victor

Né en 1866 à Poitiers (Vienne) — mort en mars 1934 — littérateur — Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône) — Alger
Article mis en ligne le 2 juin 2007
dernière modification le 5 août 2024

par R.D.

Abonné le 1er juillet 1892 à La Révolte, journal de Jean Grave — « croyez à mon entière sympathie pour les idées que vous revendiquez » (Archives Grave IFHS) — Victor Barrucand figure sur la liste des collaborateurs des Temps nouveaux qui prit la suite de La Révolte (n° 1, 4-10 mai 1895).

Il collabora également à L’Avenir (Genève, 17 numéros du 8 octobre 1893 au 30 juillet 1894) organe ouvrier indépendant de la Suisse romande et à l’En-Dehors (Paris, 91 numéros du 5 mai 1891 au 19 février 1893) de Zo d’Axa, où il esquissa, dans le n° 64 du 24 juillet 1892, un parallèle entre la vie du Christ et celle de Ravachol : « … Avec le prestige des interprétations et le miracle des sympathies altières, Ravachol apparaîtra peut-être un jour comme une sorte de Christ violent, tel que son temps et les milieux qu’il traversa le pouvaient produire, et point si inférieur aux idéals désirables. On le rapprochera peut-être de cet autre supplicié — Jésus le Galiléen — qui, à quelques égards, fut anarchiste, ainsi que le constate Ernest Renan … Si la poursuite de ce parallèle n’offrait même qu’un intérêt paradoxal, il n’y manquerait, pas de coïncidences curieuses : cet âge de 33 ans où ils moururent et le traître qui les livra dans un baiser, Chaumartin tenant l’emploi de Judas de Kérioth ».

En juin 1895, dans Les Temps nouveaux, en juillet-août dans La Sociale d’E. Pouget, Barrucand lança la campagne en faveur du pain gratuit qu’appuyèrent Kropotkine, Tortelier, E. Pouget, et divers journaux dont le Bulletin des Harmoniens (Paris, 1895-1896) et L’œuvre Sociale (Marseille, 1895) et que combattirent Élisée Reclus et Sébastien Faure qui jugeaient cette réforme irréalisable sans une révolution. La question fut reprise en 1906 par Ch. Dhooghe, syndicaliste révolutionnaire, qui, au nom de l’Union des travailleurs de l’industrie lainière de Reims, la soumit au congrès corporatif d’Amiens ; dans l’esprit du rapporteur, le pain gratuit, en garantissant aux ouvriers une nourriture essentielle, devait favoriser le succès de la grève générale. La question cependant ne fut pas discutée.

En 1896 il fit, semble-t-il, une tournée de conférences dans le Midi (Marseille, Toulon, Nîlmes et Montpellier).

En 1898 il était l’éditeur du journal La Cité Libre (Aix-en-Provence).

Barrucand représenta deux groupes de la fédération autonome des Bouches-du-Rhône (l’Espoir social de la Valentine et le groupe marseillais de Saint-Marcel) au congrès socialiste tenu à Paris, salle Japy, en 1899.

Installé en Algérie au début du siècle, Barrucand a redonné vie au journal L’Akhbar qui, sous une forme bilingue, a pris la tête du mouvement libéral, dans la tradition des « indigénophiles ». Barrucand, son directeur, devenu l’ami du général Lyautey, apparaissait dès avant la guerre comme le chef de file des rares européens luttant pour l’association entre les deux peuples, pour la défense du patrimoine artistique musulman et contre l’arabophobie. Au lendemain de la Première Guerre mondiale, il fut de ceux, peu nombreux, qui auraient voulu que la nationalité française fût donnée à tous les soldats algériens. S’efforçant de réfuter la thèse du milieu colon qui présentait les réformes introduites par la loi du 4 février 1919 comme préjudiciables aux intérêts de la colonie, il a réclamé avec insistance l’extension des droits politiques pour les Musulmans, y compris leur représentation parlementaire, mais sans aller jusqu’à demander le suffrage universel qu’il estimait imprudent.
Candidat aux élections municipales de novembre 1919 au titre indigène, à Alger, avec l’avocat antillais Maurice L’Admiral, il échoua. Porté sur la liste « jeune-algérienne » de l’Émir Khaled au scrutin partiel du 9 janvier 1921, il fut élu et ne se représenta plus en 1925. Au conseil municipal, il prit souvent la défense des « indigènes ».

Par la suite Barrucand vécut en Afrique du Nord. « Anarchiste repenti, devenu journaliste bourgeois à la solde de la Défense algérienne, organe de la ploutocratie nord-africaine » dit de lui dans La Revue anarchiste de novembre 1923 P. Vigné d’Octon qui l’appela en outre « pilleur d’épaves » pour avoir publié les manuscrits laissés par Isabelle Eberhardt, « Louise Michel saharienne », ainsi que Séverine l’avait qualifiée, qui mourut noyée dans le torrent débordé d’Aïn-Sefra. Quant à Barrucand, il avait affirmé dans le n° du 28 mai 1905 de la revue l’Akhbar dont il était directeur que le manuscrit d’Isabelle Eberhardt de Dans l’ombre chaude de l’Islam « ne contenait aucune page intacte ou achevée. »
Après sa mort en mars 1934, les élus musulmans d’Alger ont proposé que son nom fût donné à une rue de la ville.

Outre les titres cités ci-dessus, Victor Barrucand avait également collaboré à d’autres titres de la presse libertaire dont :Almanach de la Question Sociale (Paris, 1890-1902) publié sous la direction de P. Argyriades, La Revue anarchiste (Paris, 8 numéros du 15 août au 1er décembre 1893) puis La revue Libertaire (Paris, 5 numéros du 15 décembre 1893 au 20 février 1894) publiées par Henri Guérin.

OEUVRE : En dehors d’une œuvre littéraire abondante : histoire, philosophie, poésie, théâtre, romans, signalons Le Pain gratuit, Paris, 1896, 252 p. (Bibl. Nat. 8e R 13497).


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