L’Action syndicale du 28 février 1904 raconte que Désiré Becquet (nous ne savons pas quel lien il pouvait avoir avec Alexandre Becquet voir supra), criait le journal à Liévin quand la police lui dressa procès-verbal. Le juge de Paix de Béthune le condamna à 10 F. d’amende, fixant la contrainte par corps éventuelle à cinq jours, ce que bien sûr L’Action syndicale trouva disproportionné, accusant le juge de se venger, le journal ayant révélé quelques-unes des petits secrets de sa vie privée. Le rédacteur de l’article faisait remarquer que faisant appel du jugement, et susceptible d’être gracié à l’occasion du 14 juillet, Becquet n’était pas prêt de se retrouver en prison, puisqu’il était actuellement en fuite.
La police le retrouva fin mars. Selon le numéro du 3 mars 1904, Becquet dînait chez trois mineurs habitant une chambre en garni. Et les agents de demander si Becquet était inscrit chez lui.
L’Action syndicale menait une intense propagande néo-malthusienne. Pour un article intitulé « Possibilité d’aimer sans enfanter », signé « Adultérin », et pour avoir recommander et fait diffuser par ses vendeurs deux brochures Plus d’avortements et Moyens d’éviter les grandes familles, Broutchoux, « secrétaire du journal », Colbaert, administrateur, l’imprimeur, un typographe et le vendeur Becquet furent convoqués chez le juge d’instruction pour « outrages aux bonnes mœurs » ; Le 24 mars Meresse et Becquet sont condamnés chacun à 50 F d’amende, et Broutchoux à vingt jours de prison. (L’Action syndicale 27 mars 1904). Les trois font appel. Ils seront acquittés début juin par la cour d’appel de Douai, qui les « renvoie des frais de la poursuite sans dépens ».
Entre-temps Désiré Becquet avait cessé d’être, en odeur de sainteté dans les bureaux de L’Action syndicale. La livraison du 29 juin 1904 apprend à ses lecteurs que Becquet « est parti furtivement en emportant la somme de 165, 20 F. » Fuite qui, mettait l’hebdomadaire en déséquilibre financier. L’Action syndicale conseillait donc de se méfier de cet « estampeur ”, « qui a déjà commis la même indélicatesse à l’égard de plusieurs organes de défense ouvrière. » Il demande aussi « à la presse révolutionnaire de signaler en le flétrissant l’acte dégoûtant qu’à commis le faux-frère. » Pas question d’utiliser les lois bourgeoises pour poursuivre le voleur. Un « boycottage ouvrier » suffira.
Conséquence de ce vol, la Commission du journal décida le 5 juin 1906, d’agir avec autant d’énergie envers les vendeurs en retard qu’elle en a mis à l’égard de Becquet. Les vendeurs en retard furent donc avertis d’avoir à s’arranger avec la commission « le plus tôt possible », sinon ils seront dénoncés par la voix du journal. Tant il est vrai que le problème de la remontée du produit des ventes était endémique dans les journaux militants. Et Becquet était aussi pour quelque chose dans ces nouvelles difficultés, témoin la « petite correspondance » du 12 juin 1904 : « Wavrin. À D. Ton dernier versement s’élève à 1 F et a été fait le 31 janvier. Les 2 F que tu as remis à Becquet ne m’ont point été remis. »
Néanmoins le 28 août, le journal était en déficit ; Les 165, 30 F emportés par Becquet font défaut les ventes ne paient pas l’impression, et les vendeurs en retard doivent 254, 50 F au journal. D’où la menace « La Commission espère que tous les vendeurs en retard feront leur devoir, et qu’elle ne sera pas dans la pénible obligation de les clouer au pilori comme elle l’a fait pour le sieur Désiré Becquet. »
C’est la dernière fois que L’Action syndicale imprimera le nom du « faux-frère ».