Jacques Blaize vécut dans le Val-de-Marne de 1968 à 1984. Ses parents étaient d’origine ouvrière. Il était marié depuis juillet 1961 avec Ginette Bertheau, née en 1940 à Saint-Maurice (Val-de-Marne), secrétaire administrative dans des associations et des syndicats.
Après des études de mathématiques et d’économie à l’université de Paris (facultés des sciences et droit) entre 1959 et 1966, il fut embauché comme chargé de recherche opérationnelle d’abord chez Brampton-Renold (1966-1968), puis à L’Express (1969-1971) et enfin chez Buitoni (1971- 1978). Ensuite, il fut permanent à la CFDT de 1978 à 1984 avant de rejoindre l’AFME (Agence française de maîtrise de l’énergie) de 1984 à 1988.
Son engagement comme militant anarchiste et anarcho-syndicaliste fut le résultat, d’une part, de lectures, de la lutte contre la guerre d’Algérie et de quelques rencontres avec des militants de la Fédération anarchiste, d’autre part, de son adhésion à la FEN en tant que pion et chargé de cours dans un lycée entre 1960 et 1966 et de contacts avec des militants du « courant E » (École émancipée) et, bien sûr, de sa propre militance post-Mai 68 à la CFDT.
Le parcours militant de Jacques Blaize se fit essentiellement au sein de la CFDT où il exerça de nombreuses responsabilités. Il rejoignit cette organisation en 1968, ce qui lui valut d’être licencié pour activités syndicales « marginales » (sic) en 1971 pour avoir porté la revendication d’un collège unique pour les élections professionnelles. De 1971 à 1978, il milita à la Fédération Alimentation et surtout à l’UD-CFDT 94. C’est à cette période qu’il adhéra formellement à l’Alliance syndicaliste révolutionnaire et anarcho-syndicaliste (ASRAS) à la suite d’une réunion où il fut invité par Jean-Paul Clovis. Il était alors au bureau de l’Union départementale 94 (1972-1984), secrétaire du syndicat de l’alimentation du Val-de-Marne (1974-1978) qui devint pour un temps le premier syndicat de l’UD en termes numériques grâce à la pratique syndicaliste démocratique et libertaire qu’il impulsa, et membre du conseil fédéral (1974-1978) où il assuma et défendit des positions anarcho-syndicalistes qu’il présenta explicitement au bureau fédéral en 1975. Il fut alors considéré dans cette fédération comme le « leader » de l’opposition fédérale.
En 1978, il quitta la Fédération de l’Alimentation pour assurer le mandat de secrétaire général de l’UD-CFDT 94 qu’il représenta au bureau de l’Union régionale parisienne (URP) CFDT, URP dont les instances étaient opposées à son élection comme secrétaire général du 94. Il fut alors considéré, une fois de plus, comme le « leader » de l’opposition régionale, mais il refusa en 1984 de se présenter comme secrétaire général avec « l’appui » (sic) des trotskistes et d’anciens maoïstes. Jacques Blaize, dans la tradition anarcho-syndicaliste des Bourses du travail, resta toujours très attaché à la dimension interprofessionnelle du syndicalisme qui assure des contacts horizontaux entre les travailleurs et leurs syndicats. L’interpro à ses yeux protège « des tentatives de division et de l’émergence d’une « aristocratie ouvrière » avant-gardiste ».
Il participa à tous les congrès UD-CFDT 94 entre 1972 et 1984 où il défendit la position fédéraliste qui consiste à rappeler que les positions fédérales régionales ou confédérales peuvent ne pas être appliquées par les structures de base à conditions de ne pas attaquer publiquement les dites structures. L’UD 94 adopta formellement cette position combattue vigoureusement par l’URP. Au congrès de la Fédération de l’Alimentation en 1974, entre les deux tours de l’élection présidentielle, il défendit la position selon laquelle le syndicalisme n’avait pas à soutenir quelque candidat que ce fût, contre l’avis d’Edmond Maire qui lui déclara qu’il aurait des comptes à rendre à la classe ouvrière !
Lors du conflit au sein de l’URP en 1983-1984, il critiqua ceux qui défendaient la ligne confédérale et qui considéraient que « Le syndicalisme doit s’adapter jusqu’à devenir un représentant de la société, devant réguler ipso facto en son sein les contradictions de cette société ou une partie de ces contradictions. Il devient donc un acteur social en abandonnant peu ou prou son rôle de conduite de la lutte d’une classe sociale. […] En termes de pratique syndicale cela implique que le syndicat devienne un « penseur » qui transmet, du sommet vers le bas ce qu’il faut faire et ce qu’il ne faut pas faire ». Pour lui, l’UD 94 et l’opposition confédérale qu’il animait, « Le syndicalisme est, et reste, le représentant des intérêts des travailleurs […]. En termes de pratique, cela implique que le syndicat soit avant tout un outil de mobilisation des travailleurs pour mener la lutte, car c’est bien elle le moteur des transformations. […] Une des premières priorités, pour notre UD comme pour toute l’organisation, est de retrouver une pratique de l’élaboration des revendications et de propositions qui redonne toute sa place au débat […] avec les travailleurs. » (Intervention de J. Blaize à l’AG de l’URP en mai 1984.)
Parmi les multiples activités militantes de Jacques Blaize, il convient de rappeler son rôle dans l’animation et l’organisation, en 1978, de la grève des ouvrières et ouvriers de la biscuiterie AZUR à Vincennes ; durant le conflit, la production autogérée fut relancée pour soutenir la lutte, un peu dans l’esprit des Lip : « On produit, on se paye. ».Cette grève gestionnaire fut alors activement soutenue par les militant.e.s de l’ASRAS et violemment combattue par la CGT (absente de la boîte) qui arriva à torpiller la lutte en proposant de se partager le produit de la vente pour les fêtes de Noël.
Après son départ de Paris en 1984 pour le Puy d Dôme, Jacques Blaize demeura toujours adhérent CFDT à l’AFME, mais sans militantisme du fait de son statut de délégué régional. Cependant, il travailla avec l’interprofessionnel du Puy-de-Dôme et particulièrement dans l’assistance juridique aux prud’hommes. S’étant éloigné de la CFDT, il la quitta définitivement après le « discours » télévisé de Kaspar expliquant qu’il laissait la place à Nicole Notat. Cette manœuvre lui rappelait par trop les pratiques politiques en vigueur en URSS lors des grands procès staliniens.
Licencié de l’AFME en 1988, probablement à la suite d’une interview « accordée » à un canard local de Clermont-Ferrand, La Galipote, où il critiquait la politique régionale et les positions nucléaristes de son président, Giscard d’Estaing. Il créa alors un bureau d’études (SCOOP) où il lui fallut « ramer » pour gagner sa vie. Depuis, il a quelques activités militantes dans des associations plus ou moins écologistes et participe aux émissions d’une radio locale, Radio arverne, sur la maîtrise de l’énergie et la décroissance. Il est adhérent au syndicat des retraités Solidaires (SUD).
ŒUVRE : Participation régulière dans la presse CFDT du département 94. Créateur et rédacteur avec trois autres militants (Christian Dufermont (ASRAS), Henri Celié (OCL), Farjon ! de la revue libertaire Réflexion syndicaliste, clandestine à l’intérieur de la CFDT (5 parutions dont une sur l’interprofessionnel et une sur le fédéralisme.