Après avoir vécu vingt ans à Poitiers (Vienne), François deluret avait été obligé de quitter cette ville en 1928 après avoir été le meneur d’une grève.Dans les années 1930 François Deluret était un militant anarcho-syndicaliste partisan de l’unité syndicale. Secrétaire du syndicat des cheminots de Villeneuve-sur-Lot et de l’union locale des services publics, et animateur du groupe d’études sociales Élisée Reclus il était abonné à un grand nombre de journaux libertaires et collaborait à l’organe de la Ligue Internationale des combattants de la Paix (LICP) Le Barrage (Paris, mai 1934 à août 1939, 152 numéros). Membre de la LICP depuis 1932 il avait été élu au comité directeur lors du Congrès d’Agen (21-22 avril 1935) et fut réélu l’année suivante au congrès de Bernay (12-14 avril 1936). Il était également à la même époque secrétaire du Comité d’action antifasciste.
Le groupe d’études sociales, pour éviter « Les vaines querelles de tendances… qui entravaient l’action en divisant les militants » raconte dans ses souvenirs F. Deluret, n’était « ni Union Anarchiste, ni Fédération Anarchiste. Nous étions des libertaires… libres ». Il était membre de la Solidarité Internationale Antifasciste (SIA) pendant la révolution espagnole.
Lors de la déclaration de guerre il avait reçu le tract « Paix immédiate » et l’avait diffusé dans la mesure de ses possibilités. Après l’armistice il tentera à deux reprises d’aller aux nouvelles à Bordeaux en zone occupée pour y contacter des camarades mais ne parviendra pas à franchir la ligne de démarcation. Pendant l’occupation nazie, il était membre du groupe clandestin Élisée Reclus composé de militants français et espagnols à Villeneuve s/Lot. Il y recevra la visite d’André Arru, qui lui avait été présenté par Miller ancien du groupe de Bordeaux qui par sécurité était passé en zone « libre », qui à cette époque (1943), parcourait le sud de la France pour y regrouper les militants dispersés. Après l’arrestation le 3 août 1943 d’André Arru à Marseille, le groupe de Villeneuve avait échafaudé un plan, qui ne put se concrétiser, pour le faire évader.
Dans le but de regrouper les militants, il effectuera alors de nombreux voyages à Paris où il rencontrera H. Bouye, L. Laurent et J. Toublet et participera aux réunions de reconstitution du mouvement libertaire. Au début de l’été 1943, à Paris, il participait à une réunion clandestine dans les locaux de l’ancienne Bourse du travail rue du Château d’eau : « Nous étions à cette réunion une cinquantaine. Il régnait une ambiance de grande confiance dans l’avenir et ce fut facilement (trop peut-être) que toutes les décisions furent prises et que fut désigné en particulier une délégation de quatre camarades –dont deux femmes- qui iraient à Toulouse [congrès du 19 juillet 1943]. J’ai le souvenir d’être intervenu que quatre points qui seraient essentiels après guerre et au moment de tout réorganiser pour notre action : 1° — l’organisation devrait prendre le titre de « libertaire » (le nom « anarchiste » étant trop souvent mal compris dans le passé et étant chargé de sens péjoratf) ; 2° — Une seule organisation pour tout le mouvement (les tendances pouvant vivre fraternellement unies pour le même combat) ; 3°- Ne plus faire la même erreur que par le passé en créant une petite organisation syndicale parallèle à la CGT… ; 4° Dans la nouvelle CGT les copains libertaires devront tendres à assumer des postes importants pour remuer les syndiqués, en faire des syndicalistes conscients et ne pas se borner à critiquer à l’extérieur où à l’intérieur de la CGT comme dans le passé ce qui serait stérile. Tous les présents adoptèrent cela sans la moindre discussion ». A la même réunion avait été mis sur pied l’organisation d’un chantier forestier où pourraient se cacher les compagnons réfractaires au Service du travail obligatoire (STO). Délégué au congrès du 19 juillet 1943 à Toulouse, il était décu, le regroupement prévu ne s’y faisant pas. Les 29-30 octobre 1944, il était sans doute l’un des délégués de Villeneuve-sur-Lot au pré-congrès d’Agen, réunion préparatoire au congrès constitutif du mouvement libertaire.
Après la guerre il était membre de la Fédération Anarchiste (FA) et de SIA à Villeneuve s/Lot. Puis il était muté à Bordeaux où il continuait de militer auprès des frères Lapeyre et était membre de la 8e Union régionale de la CNTF. Après la reconstitution de la Fédération Anarchiste au début des années 1950, il collaborait à son organe Le Monde libertaire. En 1977 il était retraité à Poitiers où il est décédé le 25 février 1984.
F. Deluret est l’auteur de souvenirs inédits.