Dictionnaire international des militants anarchistes
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Y’en a pas un sur cent… et pourtant des milliers d’hommes et de femmes de par le monde, souvent persécutés, embastillés, goulagisés et parfois au prix de leurs vies, ont poursuivi leur chevauchée anonyme à la recherche d’un impossible rêve : un monde sans dieux ni maîtres.

DELSAUTE, Hubert, Thomas

Né à Liège le 27 mai 1848 — Employé de commerce ; menuisier — AIT — Bruxelles
Article mis en ligne le 21 février 2007
dernière modification le 5 août 2024

par R.D.

Membre de la section bruxelloise de l’Association Internationale des travailleurs (AIT), Hubert Delsaute, ancien secrétaire du groupe de libres penseurs L’Affranchissement, avait fait partie en 1869 d’un groupe de scissionistes révolutionnaires. Il avait réadhéré à la section bruxelloise lorsque la Fédération belge s’était ralliée à l’Internationale antiautoritaire et faisait partie de l’opposition radicale au sein de la Chambre du travail.

Il aurait ensuite résidé à Paris avant de revenir à Bruxelles en 1873 où il il devint membre du Cercle populaire anarchiste révolutionnaire de Nicolas Coulon et Jan Pellering et rejoignit le Cercle des libres penseurs anarchistes radicaux L’Afranchissement dont il devint le secrétaire.

Luttant contre les tendances réformistes, il avait été également présent lors de la naissance du Parti socialiste brabançon en 1877. Jusqu’en janvier 1878, il tenta dans presque toutes les réunions de saper la cause et de faire avancer les idéaux anarchistes.

Aux côtés de l’ex-communard français Émile Flahaut, il réagissait contre César De Paepe et Désiré Brismée qui, de leur côté, faisaient un plaidoyer enthousiaste pour un parti politique calqué sur la social-démocratie allemande.

Delsaute n’était pas seulement un adversaire du réformisme, il refusa aussi par principe tout rapprochement avec des clubs, comme les Cercles Réunis, où les révolutionnaires autoritaires tenaient le haut du pavé. Il n’aimait certainement pas les actions autoritaires d’un homme comme Chauvière, et sa stratégie blanquiste qui détournait, selon lui, la lutte révolutionnaire. Il n’était pas vrai qu’une petite minorité prendrait la tête de la révolution. Les changements sociaux devaient être mis en œuvre à la base et non du haut vers le bas. En mai 1879, Delsaute écrivait déjà : « Que le peuple aie besoin d’une direction pour accomplir la démolition de la bourgeoisie, je ne le conteste pas ; mais de là à avouer que le peuple doit se trouver sous la botte d’un ou de plusieurs maîtres, il y a loin. » Cependant, lorsque la Ligue Collectiviste-Anarchiste éclata en avril 1880, la plupart des anarchistes trouvèrent refuge dans les Cercles Réunis et Delsaute resta seul. Il n’entretient désormais que des contacts personnels avec ses proches et son militantisme public se limita à sa présence aux meetings et manifestations. Par exemple, nous le trouvons lors d’une manifestation pour le suffrage universel le 8 juin 1880, où lui et d’autres radicaux propageaient la voie révolutionnaire “nécessaire” à la nouvelle société et tentaient de couper le souffle aux réformistes.

Il avait participé à l’été 1879 à la création de la Ligue Collectiviste-anarchiste dont les deux autres principaux animateurs étaient Laurent Verrycken et Charles Debuyger. Il fit partie avec eux du comité de rédaction de l’organe de la ligue, Le Drapeau Rouge (Bruxelles, n°1, 1er février 1880), tiré à 1300 exemplaires et dont le numéro 5 et dernier (28 mars 1880) était entièrement consacré à la Commune de Paris. A propos de la Ligue collectiviste il avait écrit « Nous voulons l’égalité sociale inhérente au communisme anarchiste, par la libre fédération de groupes de producteurs et de consommateurs agissant selon des contrats, par la garantie morale du plein épanouissement, par le travail obligatoire et par l’égalité des fonctions » (cf. La Révolte 15 novembre 1879).

A cette époque il accueillait à son domicile de nombreux militants étrangers dont les militants français Paul Métayer et Antoine Cyvoct.
Il était en contact avec de nombreux révolutionnaires étrangers. En premier lieu avec l’anarchiste italien Errico Malatesta et aussi l’anarchiste français Arsène Crié, longtemps actif à Bruxelles, les anarchistes Apostola Paolis de Roumanie et Charles Fiorini, le radical allemand Balthasar Hohn, etc. et recevait des lettres de Pierre Kropotkine et de l’Espagnol S. Figueras, du français Paul Brousse, etc. En 1882 Louise Michel aurait résidé chez lui.

Fin 1880, il fut l’une des animateurs du Cercle des Anarchistes Bruxellois, qu’il représenta au congrès national révolutionnaire qui se tint à Bruxelles le 19 septembre. Il avait été l’un des fondateurs de l’Union révolutionnaire, un regroupement national de révolutionnaires de tous bords. Delsaute siégea au bureau fédéral de cette nouvelle organisation et, dès la fin octobre, à son comité de propagande. En préparation du congrès international de Londres du 14 juin 1881, l’Union Révolutionnaire organisa deux autres congrès nationaux, les 25 et 26 décembre 1880 à Verviers et le 20 mars 1881 à Cuesmes dans le Borinage. Delsaute était présent aux deux.

Il fut par la suite un partisan de la propagande par le fait, ce qui lui valut d’être étroitement surveillé par la police.

En février 1882, selon la police, il rédigea un manifeste anarchiste qui fut diffusé par des militants locaux à Anvers, Malines, Louvain, Gand, Bruges et Bruxelles. Malheureusement, nous n’avons pas pu trouver ce manifeste. Sa maison était devenue un refuge et un point de contact pour de nombreux réfugiés politiques, nihilistes et anarchistes russes.
En 1883, selon la police, il était « taille moyenne, cheveux et sourcils noirs grisonnants, barbe courte noire grisonnante. Il porte des lunettes à gros vers et il est ordinairement vêtu de noir et coiffé d’un chapeau mou brun fendu en milieu »
En février 1883, suite à la mort de Paul Metayer tué par la bombe qu’il manipulait avec Cyvoct, il avait été interrogé par la police.

Au début des années 1890, il habita successivement au 19 rue de la Chaumière à Schaerbeek, au 181 chaussée d’Anvers à Laeken, à partir de décembre 1878 au 113 rue de Linnée à Schaerbeek et à partir de mars 1883 au 16 rue Liedts à Bruxelles.

En 1889 La Révolte signalait qu’il faisait partie d’un groupe qui tentait d’acheter du matériel d’imprimerie.
Au début des années 1890 il était marchand de journaux.

Son militantisme lui valait d’être perquisitionné le 26 janvier 1893 à son domicile 73 rue de Schaerbeek, puis d’être signalé en mars 1894 comme l’un des rédacteurs de la brochure « La bourgeoisie, le pauvre, la misère et l’anarchie ».

Hubert Delsaute aurait cessé de militer en 1902.

Depuis les années 1870, il était marié à Joséphine Constance Eberhard de Liège et de leur mariage deux enfants étaient nés au fil du temps.