Né le 5 janvier 1903 au Havre (Seine-Inférieure) d’un père peintre décorateur. Georges Burgat obtint son Certificat d’études primaires puis devint mouleur en fonte.Très tôt il fréquenta le groupe libertaire du Havre : “…J’avais commencé à militer chez les anars, vers seize ans, à peine le premier conflit mondial terminé. J’y allais de bon cœur, de toute ma foi, de toute ma passion, de toute mon énergie… » (cf. témoignage de G. Burgat).
En 1920, il représenta le groupe anarchiste au comité d’action contre la guerre. Il fut alors condamné à trois mois de prison et 200 F d’amende pour provocation de militaires à la désobéissance ; il fut toutefois acquitté en appel à Rouen.
En mai 1921, il fut arrêté au Havre avec une douzaine d’autres — dont Marcel Bénard, Pierre Gourmelen, Henri Gautier, Marcel Dué, Émile Dieulouard, Gustave Settier et Marthe Tesson — pour avoir crié « A bas la guerre ! A bas la mobilisation » lors d’un défilé en l’honneur de Jeanne d’Arc.
Secrétaire du syndicat des mouleurs, il prit part à plusieurs grèves et, en 1925-1926 devint secrétaire du comité de défense de Sacco et Vanzetti. Les 12-14 juillet 1926, il fut le délégué du groupe du Havre au congrès de l’UA tenu à Orléans où il avait notamment condamné l’illégalisme. Il était à la même époque secrétaire du groupe du Havre de l’Union Anarchiste Communiste (UAC). Il avait égalemnt été chargé de former une fédération régionale de propagande anarchiste. Il perdit alors son emploi et, auprès d’un vieux bottier, apprit ce nouveau métier ; en 1928, il s’installa à son compte. Dès 1922, Burgat avait fréquenté à Paris l’école du propagandiste que dirigeait André Colomer. Il anima la section havraise de la Ligue internationale des combattants de la paix dont il devint le président en 1935, étudia et pratiqua l’espéranto. Il quitta par la suite l’UAC et en 1928 était adhérent de l’Association des Fédéralistes Anarchistes (AFA) fondée autour de Sébastien Faure et des opposants à la Plateforme dite d’Archinov. Il était alors le correspondant local de La Voix libertaire, l’organe de l’AFA. A l’automne 1932 il fut membre de la Fédération anarchiste de Normandie fondée à Rouen rt fut nommé secrétaire de rédaction de son organe La Raison (Rouen, 1933-1936, au moins 43 numéros) dont les autres rédacteurs étaient Lachèvre, Prince, Lecomte et Henri Zisly qui tenait la rubrique “Parmi les peuples”. Burgat était alors domicilié 8 rue du Bois au Coq au Havre.
Le 14 mai 1937, il avait présidé le meeting de soutien à l’Espagne organisé au Havre par le Groupe d’études sociales et auquel avaient assisté environ 800 personnes et dont les orateurs avaient été notamment Pierre Besnard et Sébastien Faure. Il y annonça notamment qu’une « grande maison avec jardin avait été enfin louée au Havre, qui, après réparations nécessaires, pourra recueillir une vingtaine de petits orphelins espagnols” .
Insoumis en 1939, il ne répondit pas à l’ordre de mobilisation, quitta Le Havre en septembre avec pour tout papier un certificat d’exemption militaire au nom de Robert Colinet, un compagnon qui, avent de se suicider en 1938, le lui avait donné en prévision du futur conflit. Burgat allait vivre désormais sous cette identité pendant près de dix-sept ans.
Après avoir quitté Le Havre, il se rendait dans la banlieue de Rouen où le compagnon vannier, Charles Noël, mis dans la confidence, lui confectionnait une gouttière en cuir, destinée à empêcher le genou à se plier. Désormais Burgat, ou plus exactement Colinet, n’était plus qu’un “pauvre infirme, bien portant, mais visiblement invalide”. Il s’installa quelques jours plus tard comme cordonnier à Gouy. Pour tromper son ennui et le manque de travail, il commença à y dessiner et à peindre avec acharnement, signant ses œuvres du nouveau nom de Degouy.
Suite à un contrôle d’identité le 3 mars 1940, il était convoqué à la gendarmerie et décidait immédiatement de fuir Gouy. Ayant regagné Le Havre, il fut hébergé par deux couples de camarades, notamment Henry et nénette Demaille, d’où il dut partir à cause de la curiosité des voisins. Il regagnait alors son propre domicile où sa femme, Lucienne, allait le cacher dans la cave. Avec l’arrivée des Allemands au Havre et les perquisitions systématiques des maisons, il fuyait à nouveau, retournant chez Charles Noël puis de nouveau à Gouy où il parvenait à se faire établir une carte d’identité à la mairie.
Le 10 juillet 1941, suite à une lettre le dénonçant comme “Juif et résistant”, il était l’objet d’une perquisition par la police allemande, qui ne trouvant rien de compromettant, le laissa en liberté. A partir de 1943, il commença à collaborer avec la Résistance qui s’organisait, distribuant tracts et journaux clandestins, transmettant des renseignements sur les mouvements de troupes et cachant un certain nombre de gens traqués. Au moment des opérations du débarquement de juin 1944, Gouy était en pleine zone de combat et la population s’était réfugiée dans des grottes voisines. Colinet fut à ce moment, et au péril de sa vie, plusieurs fois volontaire pour assurer le ravitaillement de ces réfugiés.
En 1946, il apprenait qu’il avait été condamné par contumace — en 1940 — à 5 ans de prison et 10 ans d’interdiction de séjour pour insoumission. N’étant pas sûr que sa participation à la Résistance lui permette d’être “blanchi”, il gardait sa fausse identité et fin juin 1948, s’installait, sous le nom de Colinet, comme cordonnier-bottier à Domme (Dordogne) où dès 1949 il réorganisait l’Amicale laïque et commençait l’année suivante à s’investir dans le syndicat d’initiative dont il allait devenir rapidement le vice-président et le demeura jusqu’au 27 décembre 1957 date à laquelle, suite à une dénonciation, il fut arrêté puis condamné à deux ans de prison avec sursis, bientôt amnistié pour faits de Résistance. Il reprit alors son véritable nom et ses activités militantes. En 1961, élu président du Syndicat d’initiative de Domme, il réorganisa le Musée Paul Reclus et abandonna le métier de bottier pour se consacrer à la peinture à l’huile et à la céramique. Burgat qui était resté en relations avec Louis Lecoin, avait adhéré à la Franc-maçonnerie en 1933.
Oeuvres : Doit-on faire communier les enfants ? (brochure) — Je m’appelle Colinet (1971, L’Amitié par le livre, Frossard, collège de Blamont, Doubs).
Sous le nom de Jacques Morin, il écrivit dans La Raison et, sous celui de Burgat-Degouy dans la presse anarchiste et pacifiste.